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Le château de Barry

ou château de Bénac

Accueil.

Sur une hauteur du village de Barry se trouve une maison d'habitation à l'endroit même où était le château des Seigneurs de la Baronnie de Bénac. Barry, qui signifie « faubourg », était un hameau du village de Bénac. On retrouve donc dans les textes anciens le nom du « château de Bénac ».

La Baronnie du Bénaquès, l'une des plus anciennes de Bigorre, fut érigée en Marquisat en 1612. Le château fut détruit le 14 juillet 1794, malgré les efforts des Maires de Bénac et de Barry qui voulaient empêcher cette destruction.

On peut encore voir quelques remparts et le corps de logis de l'ancien château. Profitez de ces photos car l’endroit ne se visite pas (propriété privée), mais nous avons eu la chance de pouvoir nous rendre sur place en 2006, avec l’accord des propriétaires.

Madame de Motteville, se rendant au mariage de Louis XIV à Saint-Jean-de-Luz (1660), séjourna au château. Elle en parle dans ses mémoires :

« Après avoir passé l'hiver à Niort, nous allâmes à Bénac, qui est situé dans l'entrée des Pirénées. Nous attendîmes en ce lieu, le retour de la Cour, qui, de Provence, devait prendre cette route pour aller selon le dessein des deux Rois, sur la frontière, conclure la paix… Je m'étais toujours imaginé que les Pirénées étaient des montagnes désertes et incultes où nulle beauté ne se pouvait rencontrer, que celle d'une affreuse solitude, jointe à leur prodigieuse hauteur, pouvait donner. Mais je fus étonnée de voir l'agréable et l'horrible y faire un mélange admirable de toutes les différentes beautés de la nature. Il se forme d'espace en espace, dans ces hautes et monstrueuses montagnes, de très belles vallées. D'un côté, on voit une montagne, dont la hauteur est voisine du ciel, couverte de neige par le haut, ayant de nuées qui se forment à la moitié de la montagne ; et, de l'autre, on en voit de moins hautes, qui sont labourées et plantées, de la même manière que le sont les collines d'autour de Paris... Il y a, dans toutes ces vallées, de beaux villages et de grands bourgs fort peuplés. Les églises y sont bien servies ; il y a plusieurs prêtres... Le langage est un espagnol corrompu, qu'il est difficile de pouvoir entendre. Les paysans sont tous grands, de bonne mine et bien habillés. Ils allaient autrefois armés de pistolets et de poignards ; mais alors, Monsieur de Tarbes, leur évêque, leur avait défendu d'en porter, à cause que souvent ils se tuaient les uns les autres et se donnaient entre eux de petites batailles. Après avoir satisfait notre curiosité sur la beauté des Pirénées, nous partîmes de Bénac le 2 de mai (1660) pour aller à Bayonne, où la Cour était déjà arrivée. »

Une belle salle voûtée, édifiée à la fin du XVe siècle, a été conservée.

Quelques morceaux de mur sont cachés sous une belle épaisseur de lierre.

Le trou du Diable

Dans les murailles en galets on remarque un trou lié à la légende de « Bos de Bénac », Seigneur du château parti en croisades. C'est le trou du diable (croix blanche sur la photo).

Dans la légende, le diable en colère quitte le château en faisant un trou dans la cheminée. Aucun maçon ne put fermer ce trou.

Curiosité :

Dans les Landes, à Poyaler près de Mugron (en Chalosse), on trouve une tour avec la même légende du trou du diable ! C'est à peu près la même histoire d'un dessert donné au diable (coquilles de noix) et de sa colère qui lui fit faire un trou dans le mur.

La tour de Poyaler

C'est l'abbé Colomez dans « Histoire de la Province et du Comté de Bigorre » en 1735, qui nous donne l'origine de cette légende : « On lit encore ce roman, écrit en vers, sur la cheminée de la chambre de Bos de Bénac. Ces vers sont conçus dans ces termes :  

Le château de Barry  

Ayant resté sept ans en terre sainte,
Le démon en trois jours m'a porté ;
Mais, déclarant mon nom, on me taxe de feinte,
Pour courir à l'hymen en sa déloyauté.
Je fais voir mon anneau ; mon vieux lévrier j'appelle,
Et c'est le seul témoin que je trouve fidèle.
Démon, ce plat de noix payera ton transport,
Et je vais dans la solitude
Me guérir, songeant à la mort,
De ce que ton emploi me fait d'inquiétude. »

Note de l'abbé Duffau : M. Taine a mis une sorte de complaisance à développer cette légende dans son Voyage aux Pyrénées. D'autres d'auteurs lui ont depuis emboité le pas. En 1825, Pierre Laboulinière nous précise que la légende de Bos : « C'est l'histoire d'Ulysse, déjà travestie pour Charlemagne et accommodée aux moeurs, aux croyances et aux événemens du temps. »

L'abbé Colomez, toujours dans « Histoire de la Province et du Comté de Bigorre » en 1735, nous donne la liste des complète des Seigneurs ayant possédé ce château jusqu'en 1735 , ainsi que son histoire :
1. Raymond Guillaume de Bénac céda les terres qu'il possédait au lieu de Saint-Pé-de-Générès au duc de Gascogne pour y fonder le monastère. En récompense, le duc lui donna quatre chevaux de son écurie à son choix et sa propre cuirasse. En 1032, il affranchit ses terres du Bénaquois de tous les droits qui lui étaient dus en qualité de duc.
2. Guillaume Auriol de Bénac
3. Raymond de Bénac
4. Odon 1er
5. Bernard, baron de Bénac
6. Raymond II fit le voyage de la Terre-Sainte où il mourut, ayant légué aux moines de Sainte-Marie-Latine l'église de Bénac, que son père avait usurpée.
7. Odon II de Bénac vendit l'église, l'an 1140, au monastère de Saint-Pé, moyennant mille trois sols morlaas, du consentement des moines de Sainte-Marie-Latine, qui se réservèrent sur cette église le droit annuel d'une once d'or.
8. Dolt de Bénac
9. Bos, baron de Bénac. il fut présent à l'assemblée des Etats de Bigorre tenue le 1er septembre 1283. Après Bos, plus d'héritiers masculins. C'est Laure de Bénac qui hérite de la baronnie de Bénac.


Ensuite, viendront :
1. Jean 1er de Montaut, seigneur de Bénac. Il servit le roi de France en Gascogne dans ses guerres, l'an 1359.
2. Jean II de Montaut
3. Arnaud de Montaut, baron de Bénac, vivait l'an 1481.
4. Annet de Montaut, baron de Bénac, mourut pendant les guerres d'Italie, avec quatre de ses enfants.
5. Jean-Marc, baron de Montaut et de Bénac, capitoul de Toulouse, l'an 1536, vivait encore l'an 1554. Il eut de son mariage avec Madeleine : Jean-Paul, baron de Bénac, mort sans alliance à la bataille de Saint-Denis.
6. Bernard, baron de Montaut et de Bénac, recueillit la succession de ses frères, fut sénéchal de Bigorre.
7. Philippe de Montaut, marquis de Bénac, sénéchal et gouverneur de Bigorre, duc de Navailles et pair de France l'an 1650. il servit dans les rangs protestants en 1622, mais il mourut catholique en 1654. Sa femme Judith de Montaut lui avait donné treize enfants.
8. Philippe II de Montaut-Bénac, duc de Navailles, pair et maréchal de France, épousa en février, l'an 1651, Suzanne de Baudéan, dame de la reine Anne d'Autriche. De ce mariage sont issus Philippe de Montaut-Bénac, mort à l'âge de 22 ans, le 2 décembre 1678, au retour de la prise de Puycerda ; Charlotte Françoise Radegonde, morte le 12 février 1696, âgée de 43 ans ; Françoise, troisième femme de Charles III de Lorraine, duc d'Elbeuf et enfin Gabrielle Eléonore, mariée à Henri d'Orléans, marquis de Rothelin. Les biens de la maison Bénac ont fondu dans cette illustre maison de Rothelin.

Lien vers Bos de Bénac. Revenir à la page "Lieux et légendes en Bigorre".

Philippe II, seigneur du château de Bénac au XVII ème siècle.

L Robert et Louis Ulysse nous précisent en 1858 dans « Le cabinet historique » : « Bénac est une autre terre, aussi baronnie, entrée chez les Montaut par Burse de Bénac, mère de Jean de Montaut, seigneur de Bénac, vivant dans la première moitié du XIVe siècle. »


J.-P. Picquet, en 1832, dans son « Voyage aux Pyrénées françaises », nous parle lui aussi du château de Bénac : « Bénac, gros bourg assis sur des atterrissements d'ardoises et de pierres roulées, conservait un vieux château bâti par les ancêtres de la maison de Navailles. Le peuple, qui n'est pas sans avoir sa mythologie, croyait fermement qu'un seigneur du lieu, fort ennuyé dans un séjour en Palestine, avait, ni plus ni moins, fait marché avec lui pour être transporté chez lui plus promptement. La tradition porte que ce damné n'avait mis qu'une nuit à son voyage, et qu'une fois au donjon, il se crut en état de narguer le diable, en ne lui donnant qu'une poignée de mauvaises noix pour prix de sa course. Satan, comme de raison, indigné de la mauvaise foi de paladin croisé, s'en vengea de la bonne manière, en faisant une brèche à l'une des tours du château. J'ai vu ce trou diabolique, qu'aucun maçon au monde n'aurait le pouvoir de boucher. Quoiqu'il en soit de l'aventure, le château tomba en ruines : on l'a vendu pour payer des créanciers et réparer les maisons des villageois. Le diable a laissé faire ; il a sans doute perdu son crédit. En effet, les historiens des fées, les enchantements et les loups-garous, ne trouvent presque plus d'auditeurs, même au village. Seulement quelques prêtres paraissent avoir conservé le pouvoir de faire des miracles, pour retrouver les choses perdues et la santé des troupeaux, pour conjurer et dissiper les orages, faire, comme on dit, la pluie et le beau temps... C'est conserver une assez grande puissance... »

Hervé Lahaye, que nous remercions, nous envoie ce cliché pris à l’intérieur. Ce sont sûrement les armoiries.